... Je devais avoir une salle tête car le couple m’hébergera pour la nuit ! Nous resterons en contact les jours suivant car Alban a suivi ma progression tout au long de la course.
Le lendemain matin j’attaque le col de la croix de fer, descend sur Grenoble et remonte à Saint Jean en Royan ou se trouve la base de vie N°1. Les villages et les paysages sont splendides, j’en prend plein les yeux et je suis heureux d’être là. Je ferais les derniers kilomètres avec un concurrent de Millau engagé sur le 2500km.
Dans la journée j’ai du faire régler mon vélo car il me fait mal au dos et chaque montée est un véritable un calvaire. Une fois un peu mieux réglé j’ai rallié la base de vie où j’ai pu prendre une douche, me changer (chacun avait droit à un drop bag de 20 litres) et dormir un peu.
Dormir n’est pas vraiment le terme exact car entre le gars à ma droite qui revit ses ascensions dans son duvet, le gars à ma gauche qui ronfle, emporté dans un sommeil chargé de fatigue et le gus, je ne sais où, qui fait sonner sa montre toutes les 5mn de peur de ne pas se réveiller, je dirais que je me suis reposé, mais dormi, non !
Levé à 4h pour partir à 5h, je manque d’organisation pour tout mettre dans la sacoche de selle. Il fait froid, du moins j’ai froid, à 8h je m’arrête prendre un café et manger, 20mn plus tard je serai bloqué par un chantier de réfection de la chaussée. Je suis parti trop tôt pour avoir l’information de la part de l’organisation et trop tard pour passer avant le début des travaux. S’en est suivi une séance de jardinage pour retrouver la piste, mais l’organisation suivait ma trace gps (chaque concurrent à une balise) et il m’ont remis sur le bon chemin. Là deux cyclistes locaux m’ont demandé si je faisais la RAF et ils m’ont accompagné jusqu’au bon croisement.
Finalement, il fait très chaud, le thermomètre affiche 35°C quand j’attaque le col de Grimone, je décide de faire une pause baignade dans le torrent que la route longe … Après tout j’ai choisi l’option B. A quelque kilomètre du col, la gendarmerie m’interpelle, gentiment, ils veulent savoir quelle est cette course. Ils me disent de me dépêcher car le temps va tourner à l’orage.
Je finis le col et fais la descente sous le soleil, mais arrivé dans la vallée je roule sur une route mouillée et le ciel gronde. Un concurrent qui était deux heures derrières moi aura droit à la grêle. Nous recevons un SMS de l’organisation nous demandant de nous mettre à l’abri à cause de violents orages, la course sera neutralisée pendant 12h (19h-7h). Je ne trouve aucun hôtel ouvert, j’enchaine les petits villages mais rien. Finalement je trouve le panneau d’un gite avec un numéro de téléphone, il est complet mais il m’envoie vers le camping le plus proche. Le gars me loue un petit mobil home et me fait à manger alors qu’il est fermé, pour rappel on est le 29 juin.
A la première base de vie, j’ai récupéré le port de crème anti-frottement, à l’origine il devait me servir pour remplir le petit pot que j’emporte. La nouvelle position m’a soulagée le dos mais le frottement de la selle m’a brulé ! Au camping, je profite de cette pause imposée pour faire le bilan, ce n’est pas fameux j’ai à peine fait plus de la moitié, je suis au km 489, mon genoux me fait souffrir, le dos va un peu mieux mais ce n’est pas la folie et au niveau postérieur, je n’ai rien à envier aux babouins !
Je prends une douche, je me soigne, je mange et après avoir donné quelques nouvelles, je me couche. Réveil à 7h par l’organisation qui nous annonce la réouverture de la course, je mettrais encore une heure pour tout mettre en place. Mon corp lâche de partout, l’objectif est de rallier la boulangerie la plus proche à 15km du camping. Une fois atteinte, je prends mon « gros » déjeuner, mais depuis la veille ça ne passe pas, j’ai du mal à m’alimenter, de fait j’envoie un message à mon coach : « Je suis au pied de la cayolle, j’ai le corps en vrac, j’ai du mal à m’alimenter … Je me laisse une paire d’heures pour savoir si je continue … »
Steph m’appelle dans la foulée :
- « Comment ça va ?
- Pas terrible … mon corps lâche !
- Ok, là, tu es en train de mettre en place une stratégie d’abandon, tu n’as pas fait tous les entrainements pour ça !
Ne me dit rien, tu as mal au genou droit !
- … Oui ! (mais comment il le sait ?)
- Ok, ne néglige pas que tu es blessé mais va dans une pharmacie et strape toi.
Tu roules un peu et tu me rappelles.
- Ok merci ! »
Je trouve donc une pharmacie, en guise de strap il me vendront de l’adhésif pour bande, mais psychologiquement ça marche. Je repars sous une pluie fine jusqu’à Tallard ou je m’arrêterais pour manger … un Kebab. J’enchainerais ensuite jusqu’à Barcelonnette accompagné par une pluie soutenue cette fois-ci. La pluie m’obligera à m’arrêter pour attendre une accalmie. Je rejoins mes beaux-parents à Barcelonnette, mon beau-père me passera une goretex et un T-shirt sec.
Après deux cafés, je m’apprête à gravir la Cayolle, mais c’était sans compter sur mes beaux-parents qui m’ont dissuadé de le faire sous la pluie et de nuit, car il est 18h30, le sommet ne serait atteint que 2h plus tard. Un indigène me dit qu’il fait 6°C en haut. Je me résigne et rejoins donc le centre du village (c’est la deuxième erreur), j’achète de quoi manger pour le lendemain et je prends une chambre dans un hôtel pour sécher mes affaires. Il est 20h, il ne pleut plus, j’ai mangé mais toute mes affaires sont trempées, je suis tellement gavé de caféine qu’il m’est impossible de dormir, je fini de tout sécher avec le sèche-cheveux. Je repartirais avant l’aube, sans avoir vraiment dormi.
La montée de la Cayolle se passe sans encombre, il n’y a pas de voiture et les marmottes sont sur la route, elles se poussent à peine quand j’arrive. Lorsque je bascule dans la descente je comprends la réticence de mon beaux père et des indigènes également, à faire la Cayolle de nuit. Je descends sans encombre jusqu’à Guillestre, où je dévaliserais une boulangerie. J’arrive rapidement à Guillaume ou se trouve la deuxième base de vie, je suis parmi les derniers du 1000 et je me retrouve mélangé aux coureurs du 300 et 500 km. Je ne resterais pas longtemps à la BdV, je repars via les gorges du Daluy, j’ai toujours adoré ces gorges, leurs couleurs rouges est tout simplement splendides.
Arrivé à Entrevaux, c’est là que ça se gâte un peu, on recommence à grimper, gentiment, puis un peu plus sérieusement ! Lors du passage du col du buis j’ai les yeux rivé sur mon compteur qui m’indique le pourcentage, il passe de 6% à 7% pour sauter à 9% puis 11, 12 et finalement 14% ! Je mettrais pied à terre et je passerais le col à pied, 14% avec 800km dans les jambes se sera pour une autre fois. Il ne reste plus que quelques concurrents du 500, dont un me dira que je suis plus trop lucide. Mes réponses à ses questions venant très lentement.
La suite sera mieux, je file sur St Auban et je prends une micro-pause à Comps Sur Arturby avant la dernière partie de la course, il est 17h30 je suis au km 760, je fais 15mn de sieste, histoire de récupérer une peu de lucidité.
J’enchaine par un long plateau pour rejoindre le pont de l’Arturby, j’ai un vent chaud de face, je ne sais pas si la route est en faux plat descendant ou montant ? Une fois le pont passé je m’engage sur les hauteurs des gorges du Verdons, ce n’est pas très dur physiquement mais il y a 21 km de montée à flan de roche, je n’aperçois jamais le col sauf une fois arrivé. Je redescends sur Aiguine, après moultes hésitations je décide de continuer et de manger à Aups.
J’arrive à Aups, les terrasses sont pleines, je rejoins un duo qui est sur le 500, il est 21h30 et il reste 120 km. J’avale une pizza et un tiramisu puis je m’équipe pour la nuit.
Dernière vérification, phare, feux, gilet, tout est ok, je m’élance dans la nuit … 10 km plus loin ma lampe s’éteint ! Ma lampe de secours est à moitié vide, je m’arrête dans un village pour recharger ma lampe de secours avec ma power bank. Mais j’ai un dilemme, la power bank peut alimenter soit la lampe soit le gps car je n’ai qu’un câble. Je câble la lampe et je m’allonge sur un banc, résigné, mais en fait non, 30 seconde plus tard je me redresse et je repars car j’ai un GPS de secours également et il est suffisamment chargé.
Il ne reste que 120 km, j’ai planifié d’arriver à 6h le lendemain matin. Je m’étonne du fait que la route ne fait que monter, tu descends 10mn et tu montes pendant des heures mais ce que j’ai oublié c’est qu’il reste 4500m de D+ sur 120 km !
L’avantage de rouler de nuit, c’est le calme et la fraicheur. Je roule avec un parisien qui est sur le 1000 comme moi, il a tellement mal aux fesses qu’il ne peut plus s’assoir, il est en danseuse quasiment tout le temps. Je le distancerais dans une cote, peu après je commence à bailler, une fois, deux fois, j’attends la troisième pour m’arrêter (c’est mon indicateur). Il est 3h, je décide de dormir 15 mn sur un banc, je dormirais 30mn au final. Le pc course m’appelle pour me dire que la route devant moi est fermée et m’indique la déviation à prendre. Je repars avec mon compagnon de route qui m’a rattrapé pendant ma sieste. Il s’arrêtera quelques kilomètres plus loin. J’arrive dans le département des Alpes Maritimes au levé du jour, c’est là que mon GPS s’arrête. Il reste quelques pourcent sur la power bank qui me serviront à le faire redémarrer. Il s’arrêtera définitivement une vingtaine de minutes plus tard. Je bascule sur mon GPS de secours, moins pratique car il affiche la trace mais pas la carte. A 6h je m’arrête dans une boulangerie à St Cézaire / Siagne.
Mon compagnon de route ne me rejoindra pas, j’enchaine les derniers kilomètre sous la chaleur qui commence à arriver. J’atteindrais Mandelieu à 9h après 4 jours de course.
Je suis heureux d’être Finisher, je devais enchainer en septembre avec les Badlands, mais je vais reprendre l’entrainement sérieusement et je les ferai l’année prochaine.
Steph, mon coach, ne pas lâché, il m’a accompagné tout le long. Je rempile pour l’année dans la Team Point Barre avec lui.
Merci aux courageux d'avoir lu jusqu'au bout ... c'est de plus en plus rare les lecteurs