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Titane course sur mesure Levacon
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- Message n°26
Re: Titane course sur mesure Levacon
Tu assures!
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soracabana- Porte Bidon
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- Message n°27
Re: Titane course sur mesure Levacon
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- Message n°28
Re: Titane course sur mesure Levacon
Ton truc pile poil a l'air super bien !
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cpt_caverne- coursier
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- Message n°29
Re: Titane course sur mesure Levacon
soracabana a écrit:Tu peux la faire toi-même gratuitement avec ça :
http://pile-poil.pagesperso-orange.fr/
Je l'avais fait avec "Pile-poil light" et le résultat était très approchant de ce qu'a trouvé Jean-Pierre....
Sinon ça risque de te coûter entre 200 et 300€.
Yepp c'est toujours bon a savoir Merci,
soracabana- Porte Bidon
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- Message n°30
Re: Titane course sur mesure Levacon
Oui, ça fonctionne bien. Ce qu'il faut c'est prendre ses mesures de manières très précises. Après ce qui est bien c'est qu'il y a plusieurs possibilité de positions en fonction de ce qu'on recherche. Dans le cas d'un vélo en titane qu'on pense utiliser pendant plusieurs années, il faut tenir compte du fait qu'en vieillissant on devient moins souple et il vaut mieux privilégier une position plus confortable que celle qui est la notre au moment de l'étude. Rien n'empêche de laisser le pivot plus long au-dessus de la potence afin plus tard de pouvoir placer une entretoise entre le JDD et la potence afin de diminuer la différence de hauteur selle/cintre si besoin est.
On peut comparer les positions trouvées avec celles qu'on utilise sur le vélo qui nous convient le mieux pour éventuellement adapter le résultat.
L'angle et la longueur de la potence sont importants. Il faut d'abord choisir sa potence avant de faire l'étude ou alors adapter l'étude en fonction de la longueur de la potence. Par exemple pour les personnes qui ont de petites jambes par rapport au buste, mieux vaut faire un cadre plus court et monter une potence longue afin d'avoir un cadre plus nerveux et un avant plus docile dans les mouvements de cintre en descente par exemple.
Il faut également choisir ses longueurs de manivelles avant de calculer les côtes du cadre et non pas l'inverse.
Le choix de la tige selle est également très important. En jouant sur le recul de la tige de selle voire même en montant une tige de selle coudée on peut modifier considérablement l'angle de pédalage. Alors attention, en faisant l'étude, penser qu'on peut toujours reculer la position de la selle mais pas l'avancer : une fois qu'on est sur une tige de selle sans recul, c'est terminé, on ne peut plus aller vers l'avant si, nécessaire. Alors privilégier la position théorique la plus en avant avec une tige de selle à recul limité (par exemple 10mm) qu'on pourra par la suite reculer en plaçant du 25mm de recul voire une tige de selle coudée.
Dans le sur mesure il est aussi possible de monter un cadre avec un angle de tube de selle très avancé (74° par exemple même si on a besoin d'un angle de 73°) afin de réduire les bases et avoir un arrière très court et nerveux (de plus cela réduit la longueur du tube supérieur et fait gagner du poids au cadre) et rattraper cet angle avec une tige de selle coudée qui replace l'angle de pédalage à 73°. C'est un exemple extrême mais cela montre les possibilités du sur mesure qui sont infinies.
A l'inverse si l'on veut un vélo confortable on pourra monter des bases longues. Sur les vélos de série, en général la longueur des bases est la même pour un cadre en taille 48 ou un cadre en taille 62 (ce qui est une hérésie). Avec le sur mesure on peut adapter cela.
De même, l'angle de direction, le rake de la fourche et la chasse pourront donner un vélo joueur ou plus stable et sécurisant en fonction des choix effectués. Attention à la distance entre la pédale lorsque la manivelle est en avant et la roue avant pour éviter le toe overlap.
Bien entendu il faut faire attention à la position du boitier de pédalier par rapport au sol, cette côte affectant tout le reste et donc de la hauteur des pneus qu'on va utiliser.
La position sur un vélo c'est ce qu'il y a de primordial, bien plus important que le poids du cadre.
Ce lien est intéressant :
https://cyclingtips.com/2018/01/beyond-the-top-tube-things-to-know-when-sizing-up-a-road-frame/
On peut comparer les positions trouvées avec celles qu'on utilise sur le vélo qui nous convient le mieux pour éventuellement adapter le résultat.
L'angle et la longueur de la potence sont importants. Il faut d'abord choisir sa potence avant de faire l'étude ou alors adapter l'étude en fonction de la longueur de la potence. Par exemple pour les personnes qui ont de petites jambes par rapport au buste, mieux vaut faire un cadre plus court et monter une potence longue afin d'avoir un cadre plus nerveux et un avant plus docile dans les mouvements de cintre en descente par exemple.
Il faut également choisir ses longueurs de manivelles avant de calculer les côtes du cadre et non pas l'inverse.
Le choix de la tige selle est également très important. En jouant sur le recul de la tige de selle voire même en montant une tige de selle coudée on peut modifier considérablement l'angle de pédalage. Alors attention, en faisant l'étude, penser qu'on peut toujours reculer la position de la selle mais pas l'avancer : une fois qu'on est sur une tige de selle sans recul, c'est terminé, on ne peut plus aller vers l'avant si, nécessaire. Alors privilégier la position théorique la plus en avant avec une tige de selle à recul limité (par exemple 10mm) qu'on pourra par la suite reculer en plaçant du 25mm de recul voire une tige de selle coudée.
Dans le sur mesure il est aussi possible de monter un cadre avec un angle de tube de selle très avancé (74° par exemple même si on a besoin d'un angle de 73°) afin de réduire les bases et avoir un arrière très court et nerveux (de plus cela réduit la longueur du tube supérieur et fait gagner du poids au cadre) et rattraper cet angle avec une tige de selle coudée qui replace l'angle de pédalage à 73°. C'est un exemple extrême mais cela montre les possibilités du sur mesure qui sont infinies.
A l'inverse si l'on veut un vélo confortable on pourra monter des bases longues. Sur les vélos de série, en général la longueur des bases est la même pour un cadre en taille 48 ou un cadre en taille 62 (ce qui est une hérésie). Avec le sur mesure on peut adapter cela.
De même, l'angle de direction, le rake de la fourche et la chasse pourront donner un vélo joueur ou plus stable et sécurisant en fonction des choix effectués. Attention à la distance entre la pédale lorsque la manivelle est en avant et la roue avant pour éviter le toe overlap.
Bien entendu il faut faire attention à la position du boitier de pédalier par rapport au sol, cette côte affectant tout le reste et donc de la hauteur des pneus qu'on va utiliser.
La position sur un vélo c'est ce qu'il y a de primordial, bien plus important que le poids du cadre.
Ce lien est intéressant :
https://cyclingtips.com/2018/01/beyond-the-top-tube-things-to-know-when-sizing-up-a-road-frame/
Dernière édition par soracabana le Jeu 5 Sep 2019 - 1:50, édité 2 fois
cpt_caverne- coursier
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Re: Titane course sur mesure Levacon
Bonjour,
Je profite de ce post, pour poser une question..
Avez vous déjà fait une etude posturale ?
si oui qu'elle norme ?
Et y a t il des Lyonnais qui on fai celà ou sur larégion ?
Merci
Roulez cool
C'
Je profite de ce post, pour poser une question..
Avez vous déjà fait une etude posturale ?
si oui qu'elle norme ?
Et y a t il des Lyonnais qui on fai celà ou sur larégion ?
Merci
Roulez cool
C'
Khunsa- Directeur Sportif
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- Message n°32
Re: Titane course sur mesure Levacon
A la limite ça vaudrait peut être le coup d'ouvrir un post spécial
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soracabana- Porte Bidon
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- Message n°33
Re: Titane course sur mesure Levacon
Khunsa- Directeur Sportif
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Re: Titane course sur mesure Levacon
Superbe !
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- Message n°35
Re: Titane course sur mesure Levacon
Merci patron....
soracabana- Porte Bidon
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- Message n°36
Re: Titane course sur mesure Levacon
Deux titane Levacon dans le col des Portes derrière la Sainte-Victoire à Aix-en-Provence :
soracabana- Porte Bidon
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- Message n°37
Re: Titane course sur mesure Levacon
J'ai monté les Campagnolo Hypéron à boyaux FMB sur le titane mais je n'ai pu faire qu'un court essai. Cela semble toutefois lui convenir :
Khunsa- Directeur Sportif
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- Message n°38
Re: Titane course sur mesure Levacon
En tout cas c'est beau !
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- Message n°39
Sur mesure ...
Voici l'extrait d'un livre sorti en 2019 qui explique de manière intéressante la nécessité d'avoir un cadre à sa taille :
"Le sport cycliste présente cette particularité d’assujettir étroitement un homme à une machine, dans un détournement très bizarre de la mécanisation opérée dans le monde du travail. Comme l’indique son étymologie, le vélo permet à l’être humain de se déplacer plus vite en utilisant ses propres forces. Mais, alors que les machines de l’artisanat ou de l’industrie servent principalement à soulager le corps humain en augmentant ses capacités de production, la compétition cycliste retourne la machine contre son utilisateur : les distances parcourues par les coureurs (dès le début) programment des efforts musculaires qui, en durée comme en intensité, n’existent nulle part ailleurs dans l’expérience humaine. Le coureur cycliste doit transmettre son énergie à sa machine, dans une sorte de collusion régressive du rapport entre l’homme et son outil. Il s’ensuit que le bon assortiment de l’homme avec sa machine est un facteur décisif de l’efficacité du coureur, mais aussi de la beauté du spectacle : plus que ne l’exige la manipulation d’un outil (tir à l’arc, raquette), la mise en mouvement d’un projectile (balle, ballon, poids, javelot, etc.), ou l’utilisation d’un accessoire (chaussures de football, gants de boxe), c’est bien d’une hybridation biomécanique qu’il s’agit. Ainsi le champion doit-il faire corps avec sa machine : on ne remarque plus l’étrangeté de cette expression, parce qu’elle est entrée dans le langage courant des commentateurs, pour exprimer l’exigence d’un style dans la mesure où l’évaluation des résultats se fait autrement.
Reste que les journalistes et écrivains du sport ont toujours montré une grande vigilance à l’égard de la beauté du geste. Décrire le style c’est comprendre mieux l’action, et donner un sens à l’efficacité d’un coureur. À l’horizon de cet exercice critique, ce sont sans doute aussi les capacités d’adaptation d’une espèce que l’on apprécie, et la possibilité d’une véritable hybridation de l’homme et de la machine. Concrètement dans l’histoire du cyclisme, les journalistes ont su distinguer la grâce particulière de Fausto Coppi, dont le corps semble construit et programmé pour faire du vélo : impressionnant par sa puissance et son aisance en machine, le champion italien redescendu parmi les hommes se montrait plus maladroit et emprunté, rappelant forcément aux sportifs et lecteurs français « L’Albatros » baudelairien, « prince des nuées » que « ses ailes de géant empêchent de marcher ».
Dans la même période mais sur un tout autre registre, c’est la continuité entre la mécanique et l’esthétique, entre la fluidité d’un geste sportif et l’élégance physique et morale de l’homme, qui vaudra à Hugo Koblet le titre de « pédaleur de charme »…, comme à Dietrich Thurau vingt-cinq ans plus tard celui d’ « Ange blond ». Inversement, l’absence ou la disgrâce du style se fait également remarquer — comme un prodige inversé : ce n’est plus l’apparence de facilité qui surprend et séduit, mais la mise en scène de la difficulté — au point que l’effort semble impossible à supporter, au spectateur même. Inutile sans doute de faire des énumérations : le cas extrême de Michel Pollentier nous suffira, en ce sens que son style exprime en même temps la souffrance de l’effort et la volonté panique de se soustraire à l’emprise de la machine. Le petit coureur belge se déhanchait d’une façon surprenante sur son vélo, sans jamais donner l’impression de le maîtriser complètement, ni même de s’y asseoir : dans une position fort peu aérodynamique, il faisait zigzaguer la machine — dépenses d’énergie qu’il a constamment cherché à réduire, mais en vain. C’est dans la violence de cette mésentente que le champion belge a conduit sa carrière. Son efficacité en machine se décidait dans cette disgrâce, comme celle d’Hennie Kuiper ou de Chris Froome aujourd’hui — dont la laideur demeure suspecte…
Eddy Merckx : pour mettre la phrase en action, il suffit de regarder les images en mouvement. Arrachées aux temps héroïques de l’audiovisuel, tournées dans des conditions acrobatiques, ces images à la fois rares, précaires et fragiles sont peut-être de mauvaise qualité matériellement — elles sont floues, elles manquent de piqué — mais, prenons pour exemple Milan-San Remo 1975, c’est sans importance au regard de leur valeur sportive, historique, et esthétique. Pourquoi cette course ? D’abord, c’est la course d’Eddy Merckx — il la remportera sept fois sur dix participations : il y est donc attendu. Ensuite, le finale de la Primavera est toujours d’une intensité extrême, parce que le parcours assez peu sélectif maintient un grand nombre de coureurs en position de gagner à moins de dix kilomètres de l’arrivée — cela va toujours très vite alors que rien n’est fait. Or cette année-là, Eddy Merckx franchit la dernière difficulté aux avant-postes d’un groupe de cinquante coureurs, quelques secondes après une escouade d’échappés : l’Italien Tino Conti, les Français Guy Sibille et Jean-Pierre Danguillaume (tous les deux chez Peugeot), sont accompagnés d’un de ses équipiers, Joseph Bruyère. En bas de la descente, Francesco Moser est sur le point de les rejoindre, quand Eddy Merckx s’extrait à son tour du peloton. S’ensuit pour le champion du monde une poursuite d’une grande violence : talonné par la horde des routiers-sprinters, il ne dispose que de quelques centaines de mètres pour rejoindre le groupe d’échappés et prendre position en vue du sprint. Le spectacle auquel on assiste alors est stupéfiant de puissance et de fluidité — car l’intelligence de course est moins compréhensible : on n’entendra pas, on ne verra pas non plus le leader de la Molteni crier à son équipier de l’attendre au moment où il va opérer la jonction.
Reste que la télévision italienne saisit quelques secondes de cet effort maximal. Sans rendre tout à fait l’impression de puissance — l’immense braquet poussé par le coureur —, les captures d’écran rendent perceptible l’engagement total du corps, qui n’est jamais débauche, effusion, ou désordre du geste. Bien au contraire : ce qui fait de cet épisode un temps fort de l’histoire du cyclisme, c’est qu’au moment décisif, l’homme s’ajuste à sa machine au plus court et au plus serré : sur ce segment de la course, Eddy Merckx ne « mouline » pas, il pousse le plus grand développement dont il dispose sur une fréquence qui peut sembler aujourd’hui assez lente (soixante-dix-huit tours de pédalier par minute). Ce qui fait à la fois la beauté et l’efficacité du geste, c’est que tous les segments se regroupent et s’orientent dans le sens du déplacement qui est aussi le sens de la lumière (tache claire sur son visage) et de la victoire en cette fin d’après-midi de printemps.
Image par image, la décomposition du mouvement en fait comprendre la logique et la beauté. Très reculé sur la selle, le coureur adopte ici une position qui optimise en même temps la puissance du pédalage et l’aérodynamisme du couple homme-machine : la poussée s’exerce jusqu’au dépliement complet de la jambe (quand même le talon descend très bas), tandis que le buste supprime la prise au vent en plongeant vers le guidon. En regardant de plus près le placement du buste (poids mort, charge inutile), on comprend que tout est calculé ou intuitionné dans le geste d’Eddy Merckx pour réduire au maximum l’encombrement de ce poids mort, de cette charge inutile, réduite en simple maillon reliant les jambes aux bras. Comme son coup de pédale très étrange est conçu pour anticiper ou retarder (esquiver en fait) le point mort haut comme le point mort bas dans la rotation du pédalier, le buste d’Eddy Merckx fait l’objet d’une ellipse, d’un évitement : intuitivement, le coureur perfectionne la fluidité de son fuselage en réduisant l’opposition de son corps à la pénétration dans l’air.
Ainsi, du corps humain ne bouge et ne se voit que ce qui sert mécaniquement à la propulsion de la machine — économie très classique des moyens. Cela sera toujours difficile à déterminer, mais c’est là sans doute que se résout l’équation égalisant la beauté avec l’efficacité du geste. À cette époque, la position adoptée par Eddy Merckx dans ces moments d’intensité est probablement la plus aérodynamique du peloton professionnel — avec celle de Francesco Moser. Hybridation, anamorphose et design plastique : pris de face comme de dos, on voit bien que le corps humain est redessiné pour défier l’atmosphère, négocier avec la résistance de l’air les accélérations possibles. Le champion bien profilé n’a pas de buste : il n’est que jambes, épaules et bras (vu de face), jambes, fesses et bras (vu de dos). La grandeur d’Eddy Merckx se décide là aussi.
L’assemblage et l’espérance de vie du couple homme-machine exigent un engagement que les médias s’emploient à documenter — c’est-à-dire mettre en scène, dramatiser, légender. Ainsi le champion est-il photographié régulièrement dans son atelier personnel, affairé auprès de son vélo — à changer un pignon, vérifier telle mesure, gonfler ses boyaux. Il s’agit de montrer que la machine demande une attention personnelle, s’inscrivant dans la vie quotidienne et privée du champion : l’intimité du couple homme-machine est vécue au plus près du couple homme-femme, au sous-sol de la maison. C’est dans les fondations de la maison que se fondent les performances de course. La vitalité comme la délicatesse de cette relation sont rendues publiques à la faveur de micro-événements bien relayés par les médias, qui singularisent fortement la vigilance d’Eddy Merckx à l’égard de ses propres sensations — les sensations de son corps à lui sur son corps à elle. Ce seront, dans le temps de la course même, les interventions d’Eddy Merckx sur certains réglages — en particulier la hauteur de selle. Le boulon que le coureur desserre et resserre pour modifier cette hauteur est au centre géométrique de la relation du couple : de ce réglage dépendent directement l’assise du coureur bien sûr, mais également tous les paramètres du pédalage — son confort, sa puissance et sa grâce, enfin ce qui justement en mécanique s’appelle le couple aussi.
Dans les situations de crise, le champion se couche sur sa machine comme pour se rendre invisible et disparaître en elle, avec elle. Mais il lui arrive aussi de la répudier pour en essayer une autre. À trois mille cent mètres de Saint-Lary-Soulan sur le Tour de France 1974, Eddy Merckx lâché par Raymond Poulidor interrompt brutalement son effort pour changer de vélo : ses douleurs au dos sont telles qu’il prend le risque (d’une perte de temps supplémentaire) en se faisant passer une autre machine (dont la selle est un peu plus haute) afin de diminuer ces douleurs. Notons que ce détail — sans conséquence sur la suite du Tour de France — est volontiers rappelé par les commentateurs comme une preuve supplémentaire, puis un symbole de l’hypersensibilité d’Eddy Merckx à l’égard de sa machine. Historiquement, cette hypersensibilité est surdéterminée par son accident sur la piste de Blois en septembre 1969 : une chute très violente lui déplace le bassin, occasionnant des douleurs résiduelles et résurgentes, et affectant définitivement ses performances dans les ascensions.
Pour mesurer la subtilité du technicien Eddy Merckx, on peut éviter d’entrer dans des considérations trop techniques ou trop savantes sur les machines : une anecdote nous suffira ici à la faire comprendre. Dans le finale de Milan-San Remo en mars 1976, le champion est rejoint par le jeune Jean-Luc Vandenbroucke sur les dernières pentes du Poggio. Il fait la descente devant le jeune professionnel de chez Peugeot, avant de le battre au sprint sans coup férir, pourrait-on dire. Revenant sur sa septième victoire dans la Primavera, Eddy Merckx expliquera qu’il a calculé sa propre descente en considérant que Jean-Luc Vandenbroucke était moins bien outillé que lui sur l’exercice : ayant couru lui-même chez Peugeot pendant deux ans au début de sa carrière, il sait que le vélo de son adversaire est moins agile que le sien dans les descentes. Des lacets du Poggio, le champion livre alors une interprétation de virtuose, poussant Jean-Luc Vandenbroucke à s’épuiser nerveusement pour maintenir le contact avec le bientôt septuple vainqueur de l’épreuve. En l’occurrence, il s’agissait donc d’exploiter la connaissance du vélo d’un autre pour ruiner ses réserves avant un sprint qui n’aura pas vraiment lieu.
Enfin, la vie du couple homme-machine, un scientifique de haut niveau et écrivain de grande clarté a cherché à en expliquer les prodiges, à partir d’une expertise véritablement physique. En effet, polytechnicien et architecte, cycliste lui-même, Claude Genzling a beaucoup œuvré pour interpréter l’efficacité des coureurs en fonction du rapport entre leurs mensurations et les cotes de leur machine, en pratiquant des relevés systématiques sur les coureurs, et leurs vélos. Soulignons qu’il est le premier dans ce cas dans le domaine du cyclisme : adossé à une véritable base de données, il se trouvait en capacité de comprendre le style d’Eddy Merckx par comparaison à des normes dont la transgression est (un peu) visible à l’œil nu, mais difficile à comprendre et à traduire. Un scientifique en face d’un sportif : l’expert commence par quelques précautions oratoires valant acte d’humilité. Devant le champion, le scientifique redoute que les théories mises au point sur les individus normaux ne soient plus valides, et qu’à l’anomalie représentée par les performances réponde une anomalie dans l’assemblage homme-machine. Or des anomalies, il y en a, mais elles confirmeront les règles en les transgressant. D’abord, et donc chiffres à l’appui, la répartition des segments sur le squelette d’Eddy Merckx est extrêmement favorable à la performance : très longs bras et jambes, buste très court constituent des avantages naturels pour actionner la machine. Ensuite et en conséquence, la mise en place du coureur sur le vélo excède nettement les normes observées dans le peloton. Il apparaît alors qu’Eddy Merckx avait mis au point intuitivement la position optimisant les possibilités mécaniques de son squelette : en arrière sur la selle, un cadre court compensé par une longue potence permettant au coureur une position très aérodynamique à grande vitesse. Le texte de Claude Genzling est formel : la machine est idéalement ajustée aux propriétés physiques du champion — le seul élément qu’il ne comprend pas : le fait que sa selle ne soit pas plus haute. On ajoutera, hors mesures, que la force du style de Merckx tient en plus à la science d’un certain confort. C’est visible à l’œil nu et cela peut sembler futile, mais la position d’Eddy Merckx en machine est… confortable : le coureur est en capacité de tenir longtemps des positions très efficaces mécaniquement, contrairement à celle de coureurs comme Hennie Kuiper par exemple, qui n’a jamais gagné un contre-la-montre ni un grand Tour, ni même une classique au terme de quelque longue échappée solitaire.
La presse et les historiens du sport interprètent régulièrement l’assortiment homme-machine dans une double perspective. La première est la thématisation du travail, disons même de l’artisanat : conjuguant compétence technique et humilité, le champion doit d’abord être un bon artisan. Les soins apportés à son outil valent préparatif de la performance, et preuve complémentaire de sa grandeur : car les fastes de la victoire se décident dans l’application et la modestie de l’action restreinte. On ne s’étonne donc pas que l’adage bien connu serve à légender les images du coureur affairé autour de son vélo : « Un bon ouvrier soigne ses outils. » La seconde perspective est l’explication des performances : on cherche à comprendre par des données chiffrées, rationalisées, ce qui est ressenti comme exceptionnel et inexplicable. L’assortiment homme -machine y pourvoit — mais pour partie seulement.
En effet, parmi les explications de la supériorité du champion, les capacités physiologiques (biologiques) de base sont également décisives — évidemment serait-on tenté d’ajouter, si cette évidence n’avait perdu de sa clarté depuis que les nouvelles techniques de dopages et les connivences institutionnelles ont permis à Monsieur Tout-le-monde de gagner le Tour de France… Moqué par ses pairs et ses aînés au seuil de sa carrière, Eddy Merckx est « l’enfant déshérité » de la tradition romantique : méprisé par les hommes, le champion favori des dieux grandira « sous la tutelle invisible d’un ange », qui veille au développement d’une dotation physique exceptionnelle. À l’époque, l’évaluation des capacités physiques n’était pas véritablement systématique et moins encore informatisée. Pour autant, Eddy Merckx a subi des tests à plusieurs moments, qui permettent par recoupement de reconstituer le portrait biomécanique complet du champion. Le rapport entre la taille (1,84 m) et le poids (73 ou 74 kg en période de course), auquel il faudrait ajouter la répartition des segments (vue ci-dessus à propos de la relation homme-machine) le placent idéalement dans la catégorie des coureurs complets, tandis que sa capacité pulmonaire (8 l), sa consommation d’oxygène (plus précisément : la capacité des poumons de récupérer l’oxygène de l’air), le volume cardiaque (1 600 cm3), le taux d’hématocrite naturel (49 – 50 15), ainsi que le nombre de pulsations cardiaques par minute (38 bpm) définissent un moteur prodigieux, qui serait à la fois très puissant, très sobre, et très endurant. En effet pendant la course, son organisme produit très tardivement l’acide lactique inhibant la poursuite de l’effort, tandis que son rythme cardiaque, qui reste de 30 bpm inférieur à celui des autres coureurs, indique que son organisme se fatigue beaucoup moins — pour prendre une comparaison, les autres courent pendant qu’il trottine. Pris séparément, certains chiffres ne sont pas optimaux (parmi les chiffres relevés chez les champions), mais leur combinaison donne à Eddy Merckx un avantage considérable sur tous ses contemporains, comme dans l’histoire du cyclisme plus généralement — pour autant qu’on bénéficie d’informations fiables.
À ce stade, on peut considérer qu’admirer Eddy Merckx, c’est admirer l’injustice. Mais pas plus que l’alphabet ne fait le poème, les paramètres physiologiques ne font pas la légende…"
"Eddy Merckx : analyse d’une légende"
Jean Cléder
2019
"Le sport cycliste présente cette particularité d’assujettir étroitement un homme à une machine, dans un détournement très bizarre de la mécanisation opérée dans le monde du travail. Comme l’indique son étymologie, le vélo permet à l’être humain de se déplacer plus vite en utilisant ses propres forces. Mais, alors que les machines de l’artisanat ou de l’industrie servent principalement à soulager le corps humain en augmentant ses capacités de production, la compétition cycliste retourne la machine contre son utilisateur : les distances parcourues par les coureurs (dès le début) programment des efforts musculaires qui, en durée comme en intensité, n’existent nulle part ailleurs dans l’expérience humaine. Le coureur cycliste doit transmettre son énergie à sa machine, dans une sorte de collusion régressive du rapport entre l’homme et son outil. Il s’ensuit que le bon assortiment de l’homme avec sa machine est un facteur décisif de l’efficacité du coureur, mais aussi de la beauté du spectacle : plus que ne l’exige la manipulation d’un outil (tir à l’arc, raquette), la mise en mouvement d’un projectile (balle, ballon, poids, javelot, etc.), ou l’utilisation d’un accessoire (chaussures de football, gants de boxe), c’est bien d’une hybridation biomécanique qu’il s’agit. Ainsi le champion doit-il faire corps avec sa machine : on ne remarque plus l’étrangeté de cette expression, parce qu’elle est entrée dans le langage courant des commentateurs, pour exprimer l’exigence d’un style dans la mesure où l’évaluation des résultats se fait autrement.
Reste que les journalistes et écrivains du sport ont toujours montré une grande vigilance à l’égard de la beauté du geste. Décrire le style c’est comprendre mieux l’action, et donner un sens à l’efficacité d’un coureur. À l’horizon de cet exercice critique, ce sont sans doute aussi les capacités d’adaptation d’une espèce que l’on apprécie, et la possibilité d’une véritable hybridation de l’homme et de la machine. Concrètement dans l’histoire du cyclisme, les journalistes ont su distinguer la grâce particulière de Fausto Coppi, dont le corps semble construit et programmé pour faire du vélo : impressionnant par sa puissance et son aisance en machine, le champion italien redescendu parmi les hommes se montrait plus maladroit et emprunté, rappelant forcément aux sportifs et lecteurs français « L’Albatros » baudelairien, « prince des nuées » que « ses ailes de géant empêchent de marcher ».
Dans la même période mais sur un tout autre registre, c’est la continuité entre la mécanique et l’esthétique, entre la fluidité d’un geste sportif et l’élégance physique et morale de l’homme, qui vaudra à Hugo Koblet le titre de « pédaleur de charme »…, comme à Dietrich Thurau vingt-cinq ans plus tard celui d’ « Ange blond ». Inversement, l’absence ou la disgrâce du style se fait également remarquer — comme un prodige inversé : ce n’est plus l’apparence de facilité qui surprend et séduit, mais la mise en scène de la difficulté — au point que l’effort semble impossible à supporter, au spectateur même. Inutile sans doute de faire des énumérations : le cas extrême de Michel Pollentier nous suffira, en ce sens que son style exprime en même temps la souffrance de l’effort et la volonté panique de se soustraire à l’emprise de la machine. Le petit coureur belge se déhanchait d’une façon surprenante sur son vélo, sans jamais donner l’impression de le maîtriser complètement, ni même de s’y asseoir : dans une position fort peu aérodynamique, il faisait zigzaguer la machine — dépenses d’énergie qu’il a constamment cherché à réduire, mais en vain. C’est dans la violence de cette mésentente que le champion belge a conduit sa carrière. Son efficacité en machine se décidait dans cette disgrâce, comme celle d’Hennie Kuiper ou de Chris Froome aujourd’hui — dont la laideur demeure suspecte…
Eddy Merckx : pour mettre la phrase en action, il suffit de regarder les images en mouvement. Arrachées aux temps héroïques de l’audiovisuel, tournées dans des conditions acrobatiques, ces images à la fois rares, précaires et fragiles sont peut-être de mauvaise qualité matériellement — elles sont floues, elles manquent de piqué — mais, prenons pour exemple Milan-San Remo 1975, c’est sans importance au regard de leur valeur sportive, historique, et esthétique. Pourquoi cette course ? D’abord, c’est la course d’Eddy Merckx — il la remportera sept fois sur dix participations : il y est donc attendu. Ensuite, le finale de la Primavera est toujours d’une intensité extrême, parce que le parcours assez peu sélectif maintient un grand nombre de coureurs en position de gagner à moins de dix kilomètres de l’arrivée — cela va toujours très vite alors que rien n’est fait. Or cette année-là, Eddy Merckx franchit la dernière difficulté aux avant-postes d’un groupe de cinquante coureurs, quelques secondes après une escouade d’échappés : l’Italien Tino Conti, les Français Guy Sibille et Jean-Pierre Danguillaume (tous les deux chez Peugeot), sont accompagnés d’un de ses équipiers, Joseph Bruyère. En bas de la descente, Francesco Moser est sur le point de les rejoindre, quand Eddy Merckx s’extrait à son tour du peloton. S’ensuit pour le champion du monde une poursuite d’une grande violence : talonné par la horde des routiers-sprinters, il ne dispose que de quelques centaines de mètres pour rejoindre le groupe d’échappés et prendre position en vue du sprint. Le spectacle auquel on assiste alors est stupéfiant de puissance et de fluidité — car l’intelligence de course est moins compréhensible : on n’entendra pas, on ne verra pas non plus le leader de la Molteni crier à son équipier de l’attendre au moment où il va opérer la jonction.
Reste que la télévision italienne saisit quelques secondes de cet effort maximal. Sans rendre tout à fait l’impression de puissance — l’immense braquet poussé par le coureur —, les captures d’écran rendent perceptible l’engagement total du corps, qui n’est jamais débauche, effusion, ou désordre du geste. Bien au contraire : ce qui fait de cet épisode un temps fort de l’histoire du cyclisme, c’est qu’au moment décisif, l’homme s’ajuste à sa machine au plus court et au plus serré : sur ce segment de la course, Eddy Merckx ne « mouline » pas, il pousse le plus grand développement dont il dispose sur une fréquence qui peut sembler aujourd’hui assez lente (soixante-dix-huit tours de pédalier par minute). Ce qui fait à la fois la beauté et l’efficacité du geste, c’est que tous les segments se regroupent et s’orientent dans le sens du déplacement qui est aussi le sens de la lumière (tache claire sur son visage) et de la victoire en cette fin d’après-midi de printemps.
Image par image, la décomposition du mouvement en fait comprendre la logique et la beauté. Très reculé sur la selle, le coureur adopte ici une position qui optimise en même temps la puissance du pédalage et l’aérodynamisme du couple homme-machine : la poussée s’exerce jusqu’au dépliement complet de la jambe (quand même le talon descend très bas), tandis que le buste supprime la prise au vent en plongeant vers le guidon. En regardant de plus près le placement du buste (poids mort, charge inutile), on comprend que tout est calculé ou intuitionné dans le geste d’Eddy Merckx pour réduire au maximum l’encombrement de ce poids mort, de cette charge inutile, réduite en simple maillon reliant les jambes aux bras. Comme son coup de pédale très étrange est conçu pour anticiper ou retarder (esquiver en fait) le point mort haut comme le point mort bas dans la rotation du pédalier, le buste d’Eddy Merckx fait l’objet d’une ellipse, d’un évitement : intuitivement, le coureur perfectionne la fluidité de son fuselage en réduisant l’opposition de son corps à la pénétration dans l’air.
Ainsi, du corps humain ne bouge et ne se voit que ce qui sert mécaniquement à la propulsion de la machine — économie très classique des moyens. Cela sera toujours difficile à déterminer, mais c’est là sans doute que se résout l’équation égalisant la beauté avec l’efficacité du geste. À cette époque, la position adoptée par Eddy Merckx dans ces moments d’intensité est probablement la plus aérodynamique du peloton professionnel — avec celle de Francesco Moser. Hybridation, anamorphose et design plastique : pris de face comme de dos, on voit bien que le corps humain est redessiné pour défier l’atmosphère, négocier avec la résistance de l’air les accélérations possibles. Le champion bien profilé n’a pas de buste : il n’est que jambes, épaules et bras (vu de face), jambes, fesses et bras (vu de dos). La grandeur d’Eddy Merckx se décide là aussi.
L’assemblage et l’espérance de vie du couple homme-machine exigent un engagement que les médias s’emploient à documenter — c’est-à-dire mettre en scène, dramatiser, légender. Ainsi le champion est-il photographié régulièrement dans son atelier personnel, affairé auprès de son vélo — à changer un pignon, vérifier telle mesure, gonfler ses boyaux. Il s’agit de montrer que la machine demande une attention personnelle, s’inscrivant dans la vie quotidienne et privée du champion : l’intimité du couple homme-machine est vécue au plus près du couple homme-femme, au sous-sol de la maison. C’est dans les fondations de la maison que se fondent les performances de course. La vitalité comme la délicatesse de cette relation sont rendues publiques à la faveur de micro-événements bien relayés par les médias, qui singularisent fortement la vigilance d’Eddy Merckx à l’égard de ses propres sensations — les sensations de son corps à lui sur son corps à elle. Ce seront, dans le temps de la course même, les interventions d’Eddy Merckx sur certains réglages — en particulier la hauteur de selle. Le boulon que le coureur desserre et resserre pour modifier cette hauteur est au centre géométrique de la relation du couple : de ce réglage dépendent directement l’assise du coureur bien sûr, mais également tous les paramètres du pédalage — son confort, sa puissance et sa grâce, enfin ce qui justement en mécanique s’appelle le couple aussi.
Dans les situations de crise, le champion se couche sur sa machine comme pour se rendre invisible et disparaître en elle, avec elle. Mais il lui arrive aussi de la répudier pour en essayer une autre. À trois mille cent mètres de Saint-Lary-Soulan sur le Tour de France 1974, Eddy Merckx lâché par Raymond Poulidor interrompt brutalement son effort pour changer de vélo : ses douleurs au dos sont telles qu’il prend le risque (d’une perte de temps supplémentaire) en se faisant passer une autre machine (dont la selle est un peu plus haute) afin de diminuer ces douleurs. Notons que ce détail — sans conséquence sur la suite du Tour de France — est volontiers rappelé par les commentateurs comme une preuve supplémentaire, puis un symbole de l’hypersensibilité d’Eddy Merckx à l’égard de sa machine. Historiquement, cette hypersensibilité est surdéterminée par son accident sur la piste de Blois en septembre 1969 : une chute très violente lui déplace le bassin, occasionnant des douleurs résiduelles et résurgentes, et affectant définitivement ses performances dans les ascensions.
Pour mesurer la subtilité du technicien Eddy Merckx, on peut éviter d’entrer dans des considérations trop techniques ou trop savantes sur les machines : une anecdote nous suffira ici à la faire comprendre. Dans le finale de Milan-San Remo en mars 1976, le champion est rejoint par le jeune Jean-Luc Vandenbroucke sur les dernières pentes du Poggio. Il fait la descente devant le jeune professionnel de chez Peugeot, avant de le battre au sprint sans coup férir, pourrait-on dire. Revenant sur sa septième victoire dans la Primavera, Eddy Merckx expliquera qu’il a calculé sa propre descente en considérant que Jean-Luc Vandenbroucke était moins bien outillé que lui sur l’exercice : ayant couru lui-même chez Peugeot pendant deux ans au début de sa carrière, il sait que le vélo de son adversaire est moins agile que le sien dans les descentes. Des lacets du Poggio, le champion livre alors une interprétation de virtuose, poussant Jean-Luc Vandenbroucke à s’épuiser nerveusement pour maintenir le contact avec le bientôt septuple vainqueur de l’épreuve. En l’occurrence, il s’agissait donc d’exploiter la connaissance du vélo d’un autre pour ruiner ses réserves avant un sprint qui n’aura pas vraiment lieu.
Enfin, la vie du couple homme-machine, un scientifique de haut niveau et écrivain de grande clarté a cherché à en expliquer les prodiges, à partir d’une expertise véritablement physique. En effet, polytechnicien et architecte, cycliste lui-même, Claude Genzling a beaucoup œuvré pour interpréter l’efficacité des coureurs en fonction du rapport entre leurs mensurations et les cotes de leur machine, en pratiquant des relevés systématiques sur les coureurs, et leurs vélos. Soulignons qu’il est le premier dans ce cas dans le domaine du cyclisme : adossé à une véritable base de données, il se trouvait en capacité de comprendre le style d’Eddy Merckx par comparaison à des normes dont la transgression est (un peu) visible à l’œil nu, mais difficile à comprendre et à traduire. Un scientifique en face d’un sportif : l’expert commence par quelques précautions oratoires valant acte d’humilité. Devant le champion, le scientifique redoute que les théories mises au point sur les individus normaux ne soient plus valides, et qu’à l’anomalie représentée par les performances réponde une anomalie dans l’assemblage homme-machine. Or des anomalies, il y en a, mais elles confirmeront les règles en les transgressant. D’abord, et donc chiffres à l’appui, la répartition des segments sur le squelette d’Eddy Merckx est extrêmement favorable à la performance : très longs bras et jambes, buste très court constituent des avantages naturels pour actionner la machine. Ensuite et en conséquence, la mise en place du coureur sur le vélo excède nettement les normes observées dans le peloton. Il apparaît alors qu’Eddy Merckx avait mis au point intuitivement la position optimisant les possibilités mécaniques de son squelette : en arrière sur la selle, un cadre court compensé par une longue potence permettant au coureur une position très aérodynamique à grande vitesse. Le texte de Claude Genzling est formel : la machine est idéalement ajustée aux propriétés physiques du champion — le seul élément qu’il ne comprend pas : le fait que sa selle ne soit pas plus haute. On ajoutera, hors mesures, que la force du style de Merckx tient en plus à la science d’un certain confort. C’est visible à l’œil nu et cela peut sembler futile, mais la position d’Eddy Merckx en machine est… confortable : le coureur est en capacité de tenir longtemps des positions très efficaces mécaniquement, contrairement à celle de coureurs comme Hennie Kuiper par exemple, qui n’a jamais gagné un contre-la-montre ni un grand Tour, ni même une classique au terme de quelque longue échappée solitaire.
La presse et les historiens du sport interprètent régulièrement l’assortiment homme-machine dans une double perspective. La première est la thématisation du travail, disons même de l’artisanat : conjuguant compétence technique et humilité, le champion doit d’abord être un bon artisan. Les soins apportés à son outil valent préparatif de la performance, et preuve complémentaire de sa grandeur : car les fastes de la victoire se décident dans l’application et la modestie de l’action restreinte. On ne s’étonne donc pas que l’adage bien connu serve à légender les images du coureur affairé autour de son vélo : « Un bon ouvrier soigne ses outils. » La seconde perspective est l’explication des performances : on cherche à comprendre par des données chiffrées, rationalisées, ce qui est ressenti comme exceptionnel et inexplicable. L’assortiment homme -machine y pourvoit — mais pour partie seulement.
En effet, parmi les explications de la supériorité du champion, les capacités physiologiques (biologiques) de base sont également décisives — évidemment serait-on tenté d’ajouter, si cette évidence n’avait perdu de sa clarté depuis que les nouvelles techniques de dopages et les connivences institutionnelles ont permis à Monsieur Tout-le-monde de gagner le Tour de France… Moqué par ses pairs et ses aînés au seuil de sa carrière, Eddy Merckx est « l’enfant déshérité » de la tradition romantique : méprisé par les hommes, le champion favori des dieux grandira « sous la tutelle invisible d’un ange », qui veille au développement d’une dotation physique exceptionnelle. À l’époque, l’évaluation des capacités physiques n’était pas véritablement systématique et moins encore informatisée. Pour autant, Eddy Merckx a subi des tests à plusieurs moments, qui permettent par recoupement de reconstituer le portrait biomécanique complet du champion. Le rapport entre la taille (1,84 m) et le poids (73 ou 74 kg en période de course), auquel il faudrait ajouter la répartition des segments (vue ci-dessus à propos de la relation homme-machine) le placent idéalement dans la catégorie des coureurs complets, tandis que sa capacité pulmonaire (8 l), sa consommation d’oxygène (plus précisément : la capacité des poumons de récupérer l’oxygène de l’air), le volume cardiaque (1 600 cm3), le taux d’hématocrite naturel (49 – 50 15), ainsi que le nombre de pulsations cardiaques par minute (38 bpm) définissent un moteur prodigieux, qui serait à la fois très puissant, très sobre, et très endurant. En effet pendant la course, son organisme produit très tardivement l’acide lactique inhibant la poursuite de l’effort, tandis que son rythme cardiaque, qui reste de 30 bpm inférieur à celui des autres coureurs, indique que son organisme se fatigue beaucoup moins — pour prendre une comparaison, les autres courent pendant qu’il trottine. Pris séparément, certains chiffres ne sont pas optimaux (parmi les chiffres relevés chez les champions), mais leur combinaison donne à Eddy Merckx un avantage considérable sur tous ses contemporains, comme dans l’histoire du cyclisme plus généralement — pour autant qu’on bénéficie d’informations fiables.
À ce stade, on peut considérer qu’admirer Eddy Merckx, c’est admirer l’injustice. Mais pas plus que l’alphabet ne fait le poème, les paramètres physiologiques ne font pas la légende…"
"Eddy Merckx : analyse d’une légende"
Jean Cléder
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- Message n°40
Re: Titane course sur mesure Levacon
Bel extrait !
En plus, Merckx est un monsieur sympa.
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Papy_Jim- coursier
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- Message n°41
Re: Titane course sur mesure Levacon
Non, on n'est pas moins souple, ce sont les raideurs qui se déplacentsoracabana a écrit:... il faut tenir compte du fait qu'en vieillissant on devient moins souple ...
Superbe vélo, de mon coté je louche sur le GraLL des cycles Léon ... mais il faudrait que je vende toute mon escadrille pour y accéder ...
J'y pense très sérieusement car avoir un vélo à sa taille ça doit être top !
Si je fais le parallèle avec la plongée, j'ai une combi sur mesure, plus jamais je ne reviendrais sur une combi en M ou M/L etc !
Bref je vais surement y venir, ce n'est qu'une question de temps
Stef18- Equipe Technique
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- Message n°42
Re: Titane course sur mesure Levacon
Pour la souplesse il faut nuancer. Un cycliste qui ne fait pas d'autre sport et ne pratique pas les étirements devient extrêmement raide, même jeune.
Un peu de natation pour le souffle, le haut du corps et la ceinture abdominale, de course à pied pour la proprioception et beaucoup d'étirements et vous pouvez être plus souples à 50 ans qu'à 20.
Pour le vélo en titane sur mesure il faut être prêt. Je dirai que l'on est plus sur un choix de vie que sur un achat pulsionnel.
Pousser la porte des cycles LeVacon ou Léon ne se conçoit pas du tout comme commander un Pinarello sur internet.
Un peu de natation pour le souffle, le haut du corps et la ceinture abdominale, de course à pied pour la proprioception et beaucoup d'étirements et vous pouvez être plus souples à 50 ans qu'à 20.
Pour le vélo en titane sur mesure il faut être prêt. Je dirai que l'on est plus sur un choix de vie que sur un achat pulsionnel.
Pousser la porte des cycles LeVacon ou Léon ne se conçoit pas du tout comme commander un Pinarello sur internet.
Papy_Jim- coursier
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- Message n°43
Re: Titane course sur mesure Levacon
Pour la souplesse c'était une boutade, je citais Penac ;-)
Pour le titane, je suis d'accord avec toi, je pense que je suis prêt
Pour le titane, je suis d'accord avec toi, je pense que je suis prêt
soracabana- Porte Bidon
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- Message n°44
Re: Titane course sur mesure Levacon
soracabana- Porte Bidon
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- Message n°45
Re: Titane course sur mesure Levacon
soracabana- Porte Bidon
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Points : 515
Date d'inscription : 03/05/2017
Localisation : Aix-en-Provence/Guyane Française
- Message n°46
Re: Titane course sur mesure Levacon
J'avais acheté une paire de Campagnolo Bora 35mm à boyaux il y a deux ans que je n'avais pas encore eu le temps de monter.
Alors j'ai mis un boyau Vittoria Pavé 25mm à l'arrière et un Vittoria 23mm à l'avant :
Ainsi qu'une cassette 10V Record Titane :
ça fait un ensemble très léger. Le vélo complet avec pédales et portes bidon pèse 6.9kg :
J'ai fait un petit essai de 50km avec du dénivelé :
Alors j'ai mis un boyau Vittoria Pavé 25mm à l'arrière et un Vittoria 23mm à l'avant :
Ainsi qu'une cassette 10V Record Titane :
ça fait un ensemble très léger. Le vélo complet avec pédales et portes bidon pèse 6.9kg :
J'ai fait un petit essai de 50km avec du dénivelé :
nficanas- coursier
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- Message n°47
Re: Titane course sur mesure Levacon
Jolies roues, tu pourras me dire si tu vois une différence sur tes parcours avec les hyperon. J'ai une paire d'hyperon et j'hésite à prendre des Bora 35 j'ai peur que cela fasse double emploi.
soracabana- Porte Bidon
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- Message n°48
Re: Titane course sur mesure Levacon
A mon niveau il y a très peu de différences. Je ne connais pas le tien, mais si tu appuies fort sur les pédales tu verras une différence dans les faux plats montants, les descentes et sur le plat et à chaque fois que tu accélèreras fort. Ce sont d'excellentes roues. Les Hypéron aussi mais moins polyvalentes, plutôt axées sur l'ascension. Après tout dépendra des boyaux que tu monteras aussi...Les deux paires de roues méritent d'excellents boyaux.
Attention, il est fort possible que les Bora soient plus rigides. Alors il faut un vélo qui puisse tenir la rigidité des roues sinon c'est le cadre qui se tordra. Ceci dit, 35mm ça reste du raisonnable encore, ce n'est pas du 50mm.
Je les ai montées volontairement sur le titane, préférant monter les Hypéron sur un acier.
Attention, il est fort possible que les Bora soient plus rigides. Alors il faut un vélo qui puisse tenir la rigidité des roues sinon c'est le cadre qui se tordra. Ceci dit, 35mm ça reste du raisonnable encore, ce n'est pas du 50mm.
Je les ai montées volontairement sur le titane, préférant monter les Hypéron sur un acier.
soracabana- Porte Bidon
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Date d'inscription : 03/05/2017
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- Message n°49
Re: Titane course sur mesure Levacon
soracabana- Porte Bidon
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Localisation : Aix-en-Provence/Guyane Française
- Message n°50